DONNEES ET ANALYSES

Bretagne : une richesse, ses viviers d’emplois dits « stratégiques »

INSEE

par Florence Le Bris (Insee)

De qui parle-t-on ?

La notion de cadres des fonctions métropolitaines est un concept récent. Les emplois de cadres des fonctions métropolitaines correspondent aux cadres et chefs d’entreprises de plus de 10 salariés présents dans les cinq fonctions métropolitaines retenues par l’INSEE :

· Conception-recherche : professions de la conception, de la recherche et de l’innovation. Dans l’industrie, elles recouvrent les phases préliminaires à la fabrication. La conception-recherche se distingue de la fonction prestations intellectuelles par la dimension d’innovation incluse dans les travaux des métiers concernés.

Exemples de métiers : chercheurs de la recherche publique, ingénieurs développement en informatique.

· Prestations intellectuelles : professions de mise à disposition de connaissances spécifiques pour le conseil, l’analyse, l’expertise…

Exemples de métiers : avocats, architectes libéraux, juristes, chefs de projets informatiques.

· Commerce inter entreprises : professions en relation directe avec le commerce de gros et le commerce entre les entreprises, que ce soit pour l’achat ou la vente.

Exemples de métiers : cadres ou ingénieurs commerciaux ou technico-commerciaux.

· Gestion : professions de la gestion d’entreprise, de la banque et de l’assurance.

Exemples de métiers : cadres des banques, de la finance, de la gestion des ressources humaines.

· Culture-loisirs : professions de la culture et des loisirs.

Exemples de métiers : professeurs d’art hors scolaire, journalistes, artistes, bibliothécaires, auteurs littéraires, scénaristes, directeurs de journaux.

Resumé

Les cadres des fonctions métropolitaines représentent 7 % des emplois en Bretagne. En forte augmentation depuis trente ans, ces emplois se développent particulièrement au sein du secteur tertiaire dans les fonctions de conception-recherche et de prestations intellectuelles. Majoritairement occupés par des diplômés de l’enseignement supérieur, ils sont situés très fréquemment au sein des pôles urbains.

Transversales à une description par secteur d’activité, certaines fonctions économiques sont dites métropolitaines (Cf. Définitions et méthode) car principalement présentes dans les grandes aires urbaines.

Parmi ces fonctions, les emplois de cadres et de chefs d’entreprise à fort contenu intellectuel, technique ou décisionnel, sont considérés comme stratégiques et participent au rayonnement des villes. Dénommés « cadres des fonctions métropolitaines (CFM) », ils représentent en Bretagne 90 400 emplois en 2010, soit environ le tiers des emplois des fonctions métropolitaines et la moitié de l’ensemble des cadres bretons (1). Les trois quarts d’entre eux sont regroupés dans sept aires urbaines (Rennes, Brest, Lorient, Vannes, Saint-Brieuc, Quimper et Lannion).

(1) : 177 300 cadres au total en Bretagne en 2010

L’analyse

Des fonctions qui se développent nettement en Bretagne

Avec un triplement de ses effectifs entre 1982 et 2010, la Bretagne est, après Midi-Pyrénées, la région où les emplois de CFM ont le plus progressé (figure 1). Particulièrement forte au cours de la dernière décennie, cette augmentation a constitué un rattrapage permettant à la Bretagne de passer du 16e au 7e rang des régions de par le poids des CFM dans le total des emplois. Les CFM représentent actuellement 7 % des emplois bretons, soit une part équivalente à la moyenne des régions de province. Avec plus d’1,1 million de CFM, l’Île-de-France reste largement prédominante, concentrant à elle seule 44 % de cette catégorie d’emplois.

Au niveau national, l’emploi des CFM a progressé de 133 % en trente ans alors que, sur la même période, l’emploi total n’a augmenté que de 20 %. Cette évolution va de pair avec la hausse des qualifications.

Figure 1 – Forte évolution des emplois de cadres des fonctions métropolitaines (CFM) en Bretagne

Figure 1 - Forte évolution des emplois de cadres des fonctions métropolitaines (CFM) en Bretagne

Source : Insee, recensements de la population

Forte croissance des emplois de CFM dans la conception-recherche et les prestations intellectuelles

Depuis les années quatre-vingts, la répartition des CFM par fonction tend à se modifier (figure 2). La gestion, qui regroupe les professions de la gestion d’entreprise, de la banque et de l’assurance, demeure, certes, la fonction employant le plus de CFM. Pour autant, l’emploi y progresse moins vite que pour les autres fonctions. La conception-recherche et les prestations intellectuelles, qui comprennent les professions liées au conseil, à l’analyse et à l’expertise, sont les fonctions ayant connu la plus forte croissance au niveau national.

Au niveau régional, Midi-Pyrénées exceptée, la Bretagne est la région où les emplois de CFM ont le plus augmenté dans ces deux activités. Elle se situe même en première position régionale s’agissant de la progression des emplois de CFM dans les activités de culture et loisirs, bien que cette fonction ait connu une croissance moindre.

En revanche, le commerce inter entreprises n’a connu qu’une faible progression de ses effectifs, voyant ainsi son poids parmi l’ensemble des emplois de CFM passer de 18 % en 1982 à 11 % en 2010 en Bretagne.

Au-delà de l’analyse fonctionnelle des emplois, une analyse transversale par secteur montre que ces emplois de CFM sont concentrés dans le secteur tertiaire.

Figure 2 – Augmentation de la part des emplois de CFM dans les activités de conception-recherche et prestations intellectuelles

Figure 2 - Augmentation de la part des emplois de CFM dans les activités de conception-recherche et prestations intellectuelles

Source : Insee, recensements de la population

Une majorité de CFM du tertiaire

En Bretagne, le tertiaire concentre 70 % des emplois de CFM, contre 15 % dans l’industrie et 9 % dans le commerce (figure 3) Ces proportions sont comparables à celles observées au niveau national.

L’importance du tertiaire reflète l’externalisation de fonctions précédemment assurées en interne (l’informatique par exemple) ou le recours à des prestations de services dans des domaines spécialisés (droit, comptabilité, stratégie, organisation…).

Les services rendus aux entreprises regroupent une grande partie de ces emplois : les activités spécialisées, scientifiques et techniques, apparentées aux métiers du conseil et de l’assistance, représentent 19 % des emplois de CFM en Bretagne. Il s’agit principalement d’activités juridiques et comptables, d’activités de conseils liées à la gestion des entreprises, d’activités d’architecture et d’ingénierie et de recherche-développement. Dans ces secteurs, les CFM comptent pour un tiers des emplois.

L’information et la communication regroupent 5 % des CFM de la région, portées par les télécommunications et les activités informatiques. Dans ces secteurs d’activité, c’est pratiquement un emploi sur deux qui est occupé par un CFM.

Les activités financières et d’assurance représentent près de 10 % des emplois bretons, surtout à travers les activités financières. Dans ces secteurs, un quart des emplois est un CFM.

Les secteurs industriels comptant le plus de CFM sont l’industrie agroalimentaire, la fabrication d’équipements électriques, électroniques, informatiques et de machines et la fabrication d’autres produits industriels. Mais les CFM ne représentent généralement qu’une faible part de l’emploi industriel sauf dans les secteurs à forte technicité (fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques (22 %) et aussi réparation et installation de machines et d’équipements (16 %)).

Dans le commerce, les emplois de CFM sont surtout présents dans les entreprises de commerce de gros (10 % des emplois) qui sont au centre des circuits d’échanges des marchandises entre entreprises, mais aussi dans le secteur des grandes surfaces (supermarchés et hypermarchés).

Figure 3 – Près de la moitié des emplois du secteur « Information et communication » sont occupés par des CFM
Répartition des emplois de CFM en Bretagne par secteur
Bretagne Aire urbaine de Rennes Aire urbaine de Brest
Effectif Part dans l’emploi (%) Effectif Spécificité Effectif Spécificité
ns : données non significatives
Note de lecture : la spécificité mesure l’écart entre la structure sectorielle des CFM de l’Aire urbaine (AU) et celle de la région. Ainsi, dans l’Aire urbaine de Rennes, les CFM sont plus représentés dans le secteur « Information et communication » qu’au niveau régional.
Source : Insee , Recensement de la population 2010
Ensemble 90 373 7,0 34 566 10 448
dont
Agriculture, sylviculture et pêche 732 1,1 ns ns ns ns
Industries extractives, énergie, eau, gestion des déchets et dépollution 818 5,7 327 1,1 ns ns
Fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac 3 230 4,4 630 0,5 ns ns
Fabrication d’équipements électriques, électroniques, informatiques ; fabrication de machines 2 996 15,4 972 0,9 764 2,2
Fabrication de matériels de transport 950 6,6 373 1,0 ns ns
Fabrication d’autres produits industriels 5 851 8,6 1 053 0,5 600 0,9
Construction 4 015 4,1 1 345 0,9 349 0,8
Commerce ; réparation d’automobiles et de motocycles 8 680 5,1 2 675 0,8 708 0,7
Transports et entreposage 2 021 3,5 901 1,2 ns ns
Hébergement et restauration 747 1,5 ns ns ns ns
Information et communication 13 715 47,7 8 334 1,6 1 115 0,7
Activités financières et d’assurance 8 864 26,4 3 049 0,9 1 634 1,6
Activités immobilières 1 324 11,4 529 1,0 ns ns
Activités scientifiques et techniques ; services administratifs et de soutien 20 099 17,5 8 444 1,1 2 628 1,1
Administration publique, enseignement, santé humaine et action sociale 8 349 2,0 2 938 0,9 1 160 1,2
Autres activités de services 7 965 12,6 2 722 0,9 814 0,9

Des spécialisations selon les aires urbaines

Dans les aires urbaines, ces emplois présentent certaines spécialisations, qui sont le reflet de l’orientation économique des villes.

La proportion d’emplois de CFM dans le tertiaire est notamment plus élevée dans les aires urbaines de Rennes (78 %) et de Brest (74 %).

Par rapport au niveau régional, l’aire urbaine de Rennes présente une forte spécialisation des emplois de CFM dans les télécommunications et les activités informatiques, mais aussi dans les activités de conseil de gestion, d’ingénierie et de recherche développement. L’aire urbaine de Brest compte relativement plus d’emplois de CFM dans le secteur industriel de fabrication d’équipements électroniques, informatiques et de machines, les activités financières, la recherche développement et l’enseignement.

Par ailleurs, l’aire urbaine de Lannion est fortement spécialisée dans les télécommunications et les activités d’ingénierie, tandis que celle de Lorient l’est dans la construction navale.

En évolution, les emplois de CFM progressent plus vite dans l’aire urbaine de Rennes, ce qui conforte le positionnement de la capitale régionale pour ce type d’emplois (34 600 emplois de CFM, soit près de 40 % du total régional en 2010). À Rennes, les emplois de cadres des fonctions conception-recherche et prestations intellectuelles se sont particulièrement développés ces trente dernières années.

La hausse des CFM est également marquée à Brest, Vannes et Lannion même si les effectifs y sont nettement plus faibles (respectivement 10 500, 4 800 et 3 300).

Plus de CFM dans les pôles urbains

À l’intérieur de ces aires urbaines, la part de l’emploi des cadres est également bien plus importante dans les pôles urbains que dans les couronnes périurbaines (figure 4). Les pôles urbains de Rennes et Lannion comptent la part la plus importante de CFM dans l’emploi total (respectivement 13,5 % et 14,6 %). Cette proportion est moins forte dans les pôles urbains de Brest (9 %), Quimper (7,5 %), Vannes (7,5 %), Lorient (6,5 %) ou Saint-Brieuc (6.4 %). Dans les grandes aires urbaines bretonnes, plus de 80 % des emplois de CFM sont situés dans le pôle contre moins de 20 % dans la couronne. Ainsi, dans l’aire urbaine de Rennes, on compte 27 700 emplois de CFM dans le pôle et 6 900 dans la couronne.

Cette concentration est encore plus marquée dans les grandes aires urbaines des autres régions de France (hors Île-de-France) : en moyenne, 90 % des emplois de cadres sont situés dans le pôle contre moins de 10 % dans la couronne.

Figure 4 – Nettement plus d’emplois de CFM dans les pôles urbains que dans les couronnes périurbaines

Figure 4 - Nettement plus d’emplois de CFM dans les pôles urbains que dans les couronnes périurbaines

Source : Insee, recensement de la population 2010

Des CFM majoritairement diplômés de l’enseignement supérieur

Tous secteurs confondus, ces emplois de cadres et de chefs d’entreprise à fort contenu intellectuel, technique ou décisionnel recouvrent différentes professions : 40 % d’entre eux sont des cadres administratifs et commerciaux d’entreprises, 25 % sont ingénieurs et cadres techniques d’entreprises, plus de 10 % d’entre eux occupent une profession supérieure liée à l’information ou aux arts, près de 10 % sont chefs d’une entreprise de dix salariés ou plus et également près de 10 % exercent une profession libérale.

Toutes fonctions confondues, ce sont majoritairement des hommes (70 %). Les fonctions conception-recherche et commerce international sont encore plus masculines (78 %). En revanche, les fonctions culture-loisirs et gestion emploient davantage de femmes (respectivement 44 % et 35 %).

La moitié de ces cadres a moins de 41 ans. Ceux qui travaillent dans la fonction conception-recherche sont relativement plus jeunes. L’ensemble des cadres a un niveau de formation particulièrement élevé : plus de la moitié d’entre eux est titulaire d’un diplôme universitaire de 2e ou 3e cycle ou d’un diplôme d’ingénieur et plus de 20 % d’un diplôme de niveau Bac + 2. La part des plus diplômés est particulièrement élevée pour les fonctions conception-recherche et prestations intellectuelles.

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