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Pérou : nouvelles fuites de pétrole dans le bassin du rio Marañon

GLOBAL VOICES

par Juan Areliano

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Capture d’écran d’une vidéo sur le désastre écologique dans l’Amazonie péruvienne. Crédit : Youtube/Onias flores cuvea

 

Nouvel épisode de contamination de l’environnement dans l’Amazonie péruvienne. Le 26 janvier 2016 a été révélée une fuite de pétrole provoquée par une fissure sur L’oléoduc nord-péruvien, sur un site proche de la ville de Chiriaco, district d’Imaza, province de Bagua, Région Amazonas. La fuite a été signalée par des membres d’une communauté native de cette zone.

Le 29 janvier, un communiqué de l’organisme d’évaluation et de supervision environnementale ( OEFA), reconnaît, au vu d’une première inspection, un impact sur des cultures de cacao et sur le bassin du Rio Inayo, un affluent du Marañón. Petroperú, la société gérant l’oléoduc annoncait alors avoir récupéré 150 barils de pétrole en émulsion dans le bassin de l’Inayo.

Bien que l’article de presse parle d’une rupture d’oléoduc qui se serait produite sur le district de la province d’Imaza dans la province de Condorcanqui, il faut se rappeler qu’en réalité ce district appartient à la province de Bagua, et des membres la communauté native s’exprimant au travers de l’Organisation Régionale des Peuples indigènes de l’Amazonie du nord du Pérou (Orpian), ont déclaré après la mise en cause de Petroperú que cette fuite avait atteint le rio Chiriaco sans que la société en cause puisse l’empêcher.

Une fuite de pétrole touche des terres agricoles et les affluents du Marañon

Au fil des jours et à cause des pluies torrentielles dans la région, la situation s’est aggravée et le pétrole répandu s’est retrouvé dans d’autres cours d’eau plus importants.

 

Des litres et des litres de pétrole se déversent du Rio Chiriaco dans le  Marañón

De son côté, un site péruvien, El Panfleto, en dépit de son caractère satirique, a partagé une vidéo dramatique sur cet accident.

Et ce ne fut pas le seul : les habitants des localités de Santa Alegría et Santa Rosa dans la  province Datem del Marañon, région de Loreto, ont fait savoir que le 3 février une fuite a été provoquée par la foudre frappant l’oléoduc. Selon eux, cette fuite aurait contaminé 3 km du cours du Fio Morona sur une profondeur de 15 cm touchant quelques 3500 personnes.
Étant donné que ces fuites ont une origine commune, l’oléoduc nord péruvien administré par PetroPerú, la responsabilité devrait retomber sur cette entreprise d’État, même si celle-ci a déjà déclaré dans plusieurs communiqués qu’elle a assuré la maintenance de l’oléoduc et que ce sont des causes naturelles (érosion, glissement de terrain) qui ont provoqué des ruptures.

Pourtant, l’annonce que PetroPerú se verrait infliger une amende de 60 millions de soles, environ 17 millions de dollars à suscité des critiques :

En plus de l’amende, @petroperu_sa doit nettoyer les fuites, le président et son équipe dirigeante doivent démissionner !

C’est incroyable, Petroperu contamine les fleuves en Amazonie et ce sont tous les Péruviens qui doivent payer l’amende.

Par la suite, avec l’apparition de nombreuses photos de cette zone, l’opinion publique a pu prendre la mesure de la gravité de l’accident. Les autorités des agglomérations touchées ont demandé une déclaration d’état d’urgence sanitaire, car il est devenu impossible pour les habitants de consommer l’eau des rivières contaminées. On estime que 2000 barils de pétroles se sont déversés et que 8000 personnes sont sinistrées, en plus du saccage de leurs cultures par ce qui devient la onzième fuite importante  en  Amazonie péruvienne depuis 2010.

A ce sujet, le cinéaste Fernando Valdivia insiste sur Facebook sur le fait que ces accidents se produisent de façon continue depuis de nombreuses années. Comme preuve il donne le lien d’une vieo datant de l’année 2009 où l’on entend un vice-ministre de l’énergie et des mines déclarer que ces fuites sont choses habituelles :

Valdivia ajoute :

Les fuites sont permanentes. Ce qui se passe c’est que l’on ne prête attention qu’aux plus importantes et surtout aux plus visibles, réduire simplement ce problème aux faits récents c’est le relativiser. Même pendant l’année 1982, dans la série documentaire réalisé en Amazonie par Jacques Yves Cousteau, il y avait un chapitre sur cet oléoduc et ses dangers. En 2007 Jean Michael Cousteau, le producteur de la série, est revenu sur ce thème (lui même ayant tourné cette partie du film) et ce que l’on a découvert, c’est qu’au lieu de s’améliorer, la situation avait empiré, principalement en matière de menaces territorialles. Aujourd’hui, huit années après, le désastre est arrivé…

Sur Facebook, Buda de Nieve réfléchis à la relation entre ce qui s’est passé et le contexte de l’actuel processus électoral au Pérou :

On a d’un côté le Pérou officiel, les candidats y parlent de progrès, d’accords commerciaux, de développement ; on a de l’autre côté la forêt péruvienne toujours oubliée (comme par hasard les candidats à cette élection se rendent aujourd’hui à Bagua). Cela fait des jours et des jours que les fleuves sont couverts de pétrole, que des centaines de personnes respirent des gaz toxiques et que des animaux meurent contaminés. La prochaine fois qu’un candidat parlera de l’importance du développement du pays, qu’il pense au type de développement qu’il souhaite pour ce pays. Voulons-nous un pays plus riche avec ce que nous voyons aujourd’hui ou voulons-nous un pays en développement durable ? C’est de cela également que l’on devrait parler à l’occasion d’une élection.

De son côté, l’ONG DAR signale que les mesures coercitives mises en place par la Loi N° 30230 (Loi de promotion de l’investissement) ne sont pas suffisantes pour éviter une contamination environnementale, car elles n’encouragent pas à la prévention ni au respect par les entreprises de leurs obligations.

Nous sommes persuadés que ces affaires sont la conséquence directe d’une démarche qui cherche à promouvoir l’investissement au risque de fragiliser les normes environnementales considérées comme des obstacles à la croissance économique. Il est de nouveau démontré par les faits que cette logique bien que pouvant permettre de nouveaux projets à court terme et la création de revenus et d’emplois, porte en elle même de grand préjudice économique, sociaux et environnementaux.

À la date de cet article, les travaux de nettoyage continuent alors que les communautés qui vivent dans le bassin du Rio Moroña continent aussi à réclamer à Petroperú un ravitaillement en eau et en aliments  immédiatement et pendant toute la durée des travaux. Elles demandent également la fourniture d’équipements de protection adaptés aux personnes qui viennent nettoyer la zone affectée. Pour sa part, le ministère de la santé a déclaré une situation d’urgence sanitaire dans une des zones affectées de la région de Loretto.

 

Article publié à l’origine sur le blog Globalizado de Juan Arellano.

 

 

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