DESTINATIONS

Tombouctou (Mali) : des trésors culturels de l’humanité en danger

UNESCO

Falaises de Bandiagara (pays dogon)

© UNESCO / A. Wolf

En plus de ses paysages exceptionnels de falaises et de plateau gréseux intégrant de très belles architectures (habitations, greniers, autels, sanctuaires et toguna – abris des hommes), le site de la région de Bandiagara possède des traditions sociales prestigieuses encore vivantes (masques, fêtes rituelles et populaires, cultes périodiquement rendus aux ancêtres à travers plusieurs cérémonies). Par ses caractéristiques géologiques, archéologiques et ethnologiques et ses paysages, le plateau de Bandiagara est l’un des sites les plus imposants d’Afrique de l’Ouest.

The Cliff of Bandiagara is an outstanding example of a traditional human settlement, representative of the Dogon culture, which has become vulnerable under the impact of tourism. The complex ritual relationships of the Dogon people with the environment include the use of curative and medicinal wild plants and the sacred associations with pale fox, jackal and crocodile.

The zone stretches from Gani-do in the south-south-west to Koudianga in the north-north-east, along the road linking Bankas, Koporo, Madougou and Diankabou. The sanctuary lies at the southern limit of the Sahara in an arid Sahelian region with averages of 580 mm of rainfall per year. It exhibits three distinctive geomorphological features: Bandiagara plateau, Bandiagara escarpment, and the Plaine du Sìno. The landscape consists of an ancient eroded terrain of flat tablelands, mesa and sandstone buttes. The rock substrate is predominantly upper sandstone of the Cambrian and Ordovician periods, formed into horizontal strata and characterized by a great variety of facies. Exposed horizontal strata periodically result in rock polygonation. In some areas the plateau is crowned by laterite, ironstone shield or impervious conglomerates. The escarpment has formed into numerous irregularities, indentations, promontories and is pierced by thalweg ravines, gorges or rocky passages connecting the plain and plateau. Thalwegs maintain a humid and shaded microclimate able to support dense vegetation. Water is also retained in rock fissures, resulting in seasonal boggy areas on horizontal or gently sloping rock strata.

The predominant vegetation type is Sudano-Sahelian open wood savannah with mosaics of steppe and chasmophytic flora. The plateau of Bandiagara is covered in a typically Sudanian savannah vegetation. A wide range of animal species is found in the region. The cliff and rock habitats support a diversity of species including fox-kestrel, Gabar goshawk, yellow-billed shrike, scarlet-cheated sunbird, abundant cliff chats and rock doves. Mammal species occur in the region and probably also in the Bandiagara escarpment.

The region is one of the main centres for the Dogon culture, rich in ancient traditions and rituals, art culture and folklore. The village of Sangha or Songo is celebrated for its triennial circumcision ceremonies and its rock carvings. The Dogon subsistence farmers did not arrive until the 15th and 16th centuries, yet the region is rich in unique architecture, from flat-roofed huts to tapering granaries capped with thatch, and cliff cemeteries. Symbolic relationships occur with the environment such as with semi-domesticated crocodiles, pale fox and jackal, and the development of elaborate masks, headdresses and ritual dances.

The large family dwelling was generally built on two levels. The facade was windowless but had a series of niches and two doors, often decorated with sculptured rows of male and female characters which symbolized the family’s successive generations. The size of the house was almost exactly half that of the ginna and generally was on one floor. Women were temporarily excluded from the domestic group during their menstrual period, one or two circular-shaped women’s houses being built at one end of the village for their use at this time. A distinction between the sexes was also made in the size of the granaries. Special areas were reserved for traditional shrines of which a great variety can be found. Some, in the caves, probably perpetuated the ritual sites of the Tellem cult. Others, built from banco, conform to several types of architecture. The most venerated are the responsibility of the Hogon, the priest who works for several villages. Living alone, his source of inspiration is the snake, whose totem is often sculpted near the door to his dwelling. The oldest mosques (Islam developed strongly in Dogon country during the 19th century) were built by local masons alongside the togu-na on the village common.

The integration of new elements in the traditional architecture is clear proof of the strength of Dogon civilization in the face of external contributions. However, it must stress the precarious preservation of these traditional habitats and handicraft techniques, lifestyles and way of thinking which helped the Dogon people to survive.

Source : UNESCO/CLT/WHC

http://whc.unesco.org/fr/list/516/

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Villes anciennes de Djenné

Habité depuis 250 av. J.-C., le site de Djenné s’est développé pour devenir un marché et une ville importante pour le commerce transsaharien de l’or. Aux XVe et XVIesiècles, la ville a été un foyer de diffusion de l’islam. Ses maisons traditionnelles, dont près de 2 000 ont été préservées, sont bâties sur des petites collines toguere et adaptées aux inondations saisonnières.

© UNESCO / Francesco Bandarin

© UNESCO / Francesco Bandarin

© UNESCO / Francesco Bandarin

© UNESCO / Francesco Bandarin

Djenné-Djeno, avec Hambarketolo, Tonomba et Kaniana, constitue un témoignage exceptionnel des civilisations préislamiques de l’intérieur du delta du Niger. Djenné offre un remarquable exemple de groupe d’édifices illustrant une période historique significative ; elle est considérée comme « la plus belle ville d’Afrique », ou encore comme la « ville africaine typique ».

La crue annuelle du Niger et de ses affluents est un phénomène naturel essentiel aussi bien dans la région de Djenné que dans tout l’intérieur du delta. La crue recouvre toutes les terres, à l’exception de quelques hauteurs connues sous le nom de toguere. Les fouilles menées entre 1977 et 1981 sur le toguere de Djenné-Djeno, dans le bassin inondé du Bani, 3 km au sud-est de Djenné, ont montré que l’occupation humaine y a été continue de 250 av. J.-C. au XIVe siècle.

Différentes phases d’occupation ont été mises en évidence. Au cours d’une période préurbaine, le peuple Bozo vivait de la pêche et de la riziculture. La phase d’urbanisation qui suivit fut probablement le fait du peuple Nono, dont les marchands firent rapidement de la ville une place commerciale et un point essentiel du commerce de l’or transsaharien, qui débuta au IXe ou au Xe siècle en Afrique occidentale, pour répondre à la demande des musulmans. La découverte de nombreuses structures domestiques (murs, maisons, restes de foyers) et d’un grand nombre d’objets en métal et en terre cuite a fait de Djenné-Djeno un site archéologique majeur pour l’étude de l’évolution de l’habitat, des techniques industrielles et artisanales, et de la diffusion de l’islam.

La découverte de restes organiques, dont un grand nombre de grains de riz africain, a permis de beaucoup mieux comprendre comment s’y était développée la riziculture. D’autres toguere, comme ceux de Hambarketolo, Tonomba et Kaniana, ont également livré d’importantes découvertes. Toutes ces collines, qui étaient un refuge naturel à l’époque des crues, sont des sites archéologiques potentiels, et méritent à ce titre d’être protégées.

Au XIVe siècle, Djenné-Djeno a été abandonnée en faveur de Djenné, qui était habitée depuis le XIe siècle. L’histoire du sacrifice expiatoire d’une jeune fille, Tepama, murée vivante pour garantir la prospérité de la ville, doit être replacée dans le contexte religieux d’une époque où les croyances animistes et le fétichisme ne s’étaient pas encore effacés devant l’islam. Introduit par des marchands Marka, ce dernier ne s’est pas affirmé avant la fin du XIIIe siècle, époque à laquelle le sultan Koumboro s’y convertit. Il abandonna son palais et en fit la première mosquée de Djenné ; celle-ci fut détruite en 1830.

Comme Tombouctou, Djenné a connu son âge d’or aux XVe et XVIe siècles. La ville était alors un centre majeur de diffusion de l’islam. Prise par les Marocains en 1591, puis par les Peuls en 1810, par les Toucouleur en 1862, enfin par les troupes coloniales françaises en 1893, Djenné ne connut aucune nouvelle phase de développement important jusqu’à ce que le Mali ait conquis son indépendance. La période coloniale a laissé des traces importantes sur la ville, notamment avec la reconstruction de sa grande mosquée, en 1906-1907. Ce monument, construit pour 3 000 fidèles, est cependant un pastiche assez réussi de l’architecture religieuse locale.

La ville de Djenné, qui s’étend sur plusieurs toguere, est coupée en deux par une large avenue. Au sud, la place du marché est dominée par la grande mosquée. Quelque 1850 maisons traditionnelles (en 1982) se répartissent de part et d’autre de cet axe central, sur une ancienne parcelle de terrain de 20 ha environ. Le trait principal de l’architecture domestique, influencée par celle du Maroc, réside dans sa verticalité. Des contreforts scandent les façades des maisons à deux niveaux dont les entrées sont toujours particulièrement soignées.

Outre ce quartier historique, différents édifices contemporains ont été construits lors des extensions successives des limites de la ville. Il faut enfin mentionner les ports de Djenné, qui sont au nombre de 17, et notamment celui de Bambana, où faisaient escale les pirogues venues de Tombouctou.

Source : UNESCO/CLT/WHC

http://whc.unesco.org/fr/list/116/

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Tombeau des Askia

La spectaculaire structure pyramidale du tombeau des Askia, édifiée par Askia Mohamed, Empereur du Songhaï, en 1495 dans sa capitale Gao, témoigne de la puissance et de la richesse de l’empire qui s’épanouit aux XVe et XVIe siècles grâce au contrôle du commerce transsaharien, notamment du sel et de l’or. L’ensemble, y compris la tombe pyramidale, les deux mosquées à toit plat, le cimetière de la mosquée et l’espace des assemblées en plein air, fut édifié lorsque Gao devint la capitale de l’Empire songhaï et après qu’Askia Mohamed eut fait de l’islam la religion officielle de l’Empire à son retour de La Mecque.

© UNESCO / Nomination File

© OUR PLACE The World Heritage Collection

Le tombeau des Askia reflète la manière dont les traditions de construction locales, répondant à des besoins islamiques, ont su absorber des influences venues du nord de l’Afrique pour créer un style architectural unique dans tout le Sahel de l’Afrique de l’Ouest. Le site reflète la tradition architecturale spécifique de cette région, et notamment la manière dont les constructions ont évolué, au fil des siècles, grâce à un entretien régulier, réalisé selon des techniques traditionnelles. C’est la caractéristique principale de la grande mosquée de Gao, qui domine la partie nord de cette ville, près du fleuve Niger.

Le site consiste en une tombe et une mosquée enfermée dans une enceinte. Cette dernière occupe la partie ouest, entre la tombe et le fleuve, et une partie de l’aire située au nord. La ville entourant le site n’est composée, en grande partie, que de maisons traditionnelles aux murs de terre et aux toits plats, entourées par des cours de plan régulier, disposées selon un plan rectiligne. La mosquée et la vieille ville de Gao forment ensemble l’un des sites majeurs de la partie centrale du Mali ; cette petite oasis occupe l’extrémité méridionale du désert du Sahara.

Le tombeau pyramidal est fait de briques crues revêtues d’un enduit de terre. Des pieux en bois tortueux hérissent la façade de la tombe, et permettaient de refaire facilement l’enduit. Du côté est, un escalier extérieur en colimaçon mène à son sommet. La forêt des échafaudages de bois, et les lignes sculptées de l’édifice, qui se sont développées au cours de siècles entiers de réfections de l’enduit, se combinent pour créer un ensemble architectural tout à fait unique.

Deux bâtiments de mosquée à toit plat. Du côté est de la tombe se trouve une grande salle de prière à toit plat, destinée aux hommes. Le plafond, fait de poteaux de bois recouverts de terre, repose sur 69 robustes piliers en brique crue enduits, carrés, proches l’un de l’autre, et disposés sur trois files. Le milieu du mur oriental du sanctuaire est occupé par un mihrab à double niche. Le cimetière de la mosquée , à l’extérieur du mur interne, entoure la tombe et la mosquée, et comporte de nombreuses stèles en pierre inscrites. Remontant à l’époque des Askia, il était encore utilisé à la fin des années quatre-vingt du XXe  siècle.

L’espace des assemblées à ciel ouvert. La partie orientale de la plus grande enceinte, dont la superficie est de l’ordre de un hectare, est un espace ouvert utilisé pour les prières collectives lors du festival de Tabaski. Il a été régulièrement utilisé depuis le XVe  siècle pour d’autres fonctions cultuelles, comme les mariages locaux au cours desquels les cérémonies islamiques se mêlaient de traditions animistes.

Gao, probablement fondée à la fin du VIIe  siècle, apparaît dans les chroniques arabes sous le nom de Kaw Kaw. La construction de la tombe, qui remonte au XIe  siècle, est attribuée à Mohamed Aboubacar Sylla (Askia Mohamed), le fondateur de la dynastie Askia. La prospérité de son empire se fondait sur le contrôle des routes transsahariennes dirigées vers le nord, et de celles qui menaient des forêts vers sud, ainsi que sur le commerce de l’or et du sel qui empruntait ces voies. On raconte qu’Askia Mohamed, traversant l’Égypte pour se rendre à La Mecque, fut impressionné par les pyramides et décida de construire pour lui-même une tombe pyramidale. Toutefois, cet édifice se rattache aussi à une longue tradition saharienne de grands tumuli ancestraux ou de collines funéraires, telles qu’il en existait dès le Ier  millénaire av. J.-C. Ce choix peut également avoir été influencé par les minarets carrés, les escaliers à trois marches des zawiyas ibadites, ces sanctuaires de la région du Mzab, au sud de l’Algérie.

Au cours du règne d’Askia Mohamed, l’Empire songhaï devint, avec Tombouctou, le centre intellectuel et religieux de l’Afrique de l’Ouest, et développa des liens culturels et commerciaux étroits avec le nord de l’Afrique, l’Europe et le Moyen-Orient. Différents conflits internes et l’importance croissante prise par les routes maritimes de l’Afrique occidentale au XVIe  siècle portèrent au déclin graduel de l’empire. Au milieu du XIXe siècle, la ville était devenue un village de trois ou quatre cents maisons dans lequel ne subsistait plus qu’un monument, le tombeau des Askia.

La tombe semble avoir toujours été utilisée comme une partie de la mosquée : son nom d’Askia Djira , qui signifie littéralement « la mosquée d’Askia », paraît avoir été celui utilisé au cours de l’époque coloniale. Au cours des années soixante du XXe siècle, la salle de prière des hommes, jugée trop petite, a été agrandie en recourant à des techniques et à des matériaux traditionnels. La modification la plus importante apportée depuis au site a été la construction, en 1999, d’un vaste mur d’enceinte en ciment.

Source : UNESCO/CLT/WHC

Description historique

Gao est l’une des anciennes villes d’Afrique au sud du Sahara. Probablement fondée à la fin du VIIe siècle, elle apparaît au XIe siècle dans les chroniques arabes sous le nom de Kaw Kaw. En 1137, elle devint la capitale de l’empire Songhaï.

La construction du tombeau est attribuée à Mohamed Aboubacar Sylla, neveu de Sonni Ali Ber, qui régna de 1464 à 1492 et étendit les limites de l’empire Songhaï par de nombreuses batailles contre les Touaregs nomades, les Peuls et les Mossi qui harcelaient les frontières de l’empire. À la mort de Sonni Ali Ber, son neveu Mohamed Aboubacar Sylla, connu sous le nom de Askia Mohamed, inaugura la dynastie des Askia.

Askia Mohamed a poursuivi les politiques expansionnistes de son oncle et agrandi l’empire jusqu’à la côte atlantique à l’ouest, jusqu’à l’Aïr au nord (aujourd’hui au Niger) et au sud jusqu’aux limites de la forêt. La prospérité de l’empire reposait sur le contrôle des routes transsahariennes au nord, des routes en provenance de la forêt au sud, et du négoce de l’or et du sel qui les traversait. L’empire était un successeur des empires plus anciens du Ghana et du Mali, qui ont eux aussi prospéré grâce au contrôle des précieuses routes marchandes.

On dit qu’Askia Mohamed, lorsqu’il traversa l’Égypte lors de son pèlerinage pour la Mecque, fut très impressionné par les pyramides et décida à son retour de construire un tombeau pyramidal. Cependant, on pourrait aussi penser que ce tombeau s’inscrit dans la tradition saharienne ancestrale de tumuli ou de tertres funéraires érigés sur les tombeaux dès le premier millénaire av. J.-C. Ce style pourrait aussi avoir été influencé par les minarets carrés, les escaliers à trois marches des zawiyas ibadites, ou sanctuaires sacrés, de la région du Mzab au sud de l’Algérie, un lien peut-être renforcé par les nombreux érudits ibadites qu’accueillit Askia Mohamed.

Sous le règne d’Askia Mohamed, l’empire Songhaï devint, avec Tombouctou, le centre intellectuel et religieux d’Afrique de l’Ouest, instaurant des liens culturels et commerciaux forts avec l’Afrique du Nord, l’Europe et le Moyen-Orient.

Des querelles internes et l’importance croissante des routes maritimes vers l’Afrique de l’Ouest au XVIe siècle a entraîné le déclin progressif de l’Empire. Au milieu du XIXe siècle, il était devenu un village de trois à quatre cent maisons, avec un seul monument restant : le tombeau des Askia.

Il y a débat quant à la question de savoir si Askia Mohamed a été enterré dans le tombeau à son décès en 1529. De l’avis général à Gao, son corps ne s’y trouve pas et il fut enterré totalement à l’écart du site.

Le tombeau semble avoir toujours été utilisé en tant que partie de la mosquée – on dit que le nom Askia Djira, littéralement la mosquée de l’Askia, fut le sien jusqu’à l’ère coloniale.

Dans les années 1960, la salle des prières pour les hommes fut jugée trop petite et fut agrandie. Deux nouvelles rangées de colonnes furent construites le long des quatre rangées d’origine. En 1975, le bâtiment fut encore agrandi pour englober le mihrab, isolé à l’origine dans la cour. Tous ces travaux furent effectués à l’aide des techniques et matériaux traditionnels et ils s’intègrent bien à l’original. Le plus grand changement du site est la construction en 1999 d’un grand mur d’enceinte en ciment, apparemment nécessaire pour garder le contrôle des usages du site.

Source : évaluation des Organisations consultatives

http://whc.unesco.org/fr/list/1139/

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GLOBAL VOICES

TOMBOUCTOU : DES TRESORS CULTURELS DE L’HUMANITE EN DANGER

Ecrit par Abdoulaye Bah

Le nom de Tombouctou évoque une aura et un caractère majestueux [en] à travers le monde. Cependant la guerre au nord du Mali et la présence des groupuscules extrémistes font peser une lourde menace sur le sort deTombouctou.   Dans un communiqué de presse, la Directrice générale de l’UNESCO, Mme Irina Bokova, a exprimé sa préoccupation concernant le risque que font peser les combats sur le patrimoine culturel mondial de Tombouctou: D’après des informations récentes publiées par la presse, les rebelles ont pénétré dans le site et des tirs y ont été entendus.

La mosquée Sankore de Tombouctou License Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0

Aux XVe et XVIe, la ville de Tombouctou était un centre culturel et de propagation de la foi musulmane dont le rayonnement allait bien au-delà des limites du Mali. Elle était dotée d’universités où venaient enseigner des savants de tout le monde musulman.  Elle possède encore trois grandes mosquées, Sidi Yahia, Djingareyber et Sankoré qui remonte à son âge d’or, mais elles sont menacées par l’avancée du sable. Elle a surtout un grand nombre de livres.

Cependant, il est à craindre que la fuite des populations vers les pays voisins ou d’autres régions du Mali devant les combats de ces derniers jours, ne fasse perdre à l’humanité un trésor inestimable pour toujours. Christelle Marot, journaliste et blogueuse de Casablanca, traitant de la richesse de Tombouctou en documents écrits estime sur africultures.com que:

Ces 25 000 manuscrits ne seraient que le sommet de l’iceberg. On estime à près de 100 000 le nombre d’écrits aux mains des familles de Tombouctou, sans compter les collections privées détenues par les habitants des régions de Kidal, Gao, Ségou ou Kayes, qui pourrait conduire au chiffre édifiant de 700 000, voire un million pour le Mali et la sous-région. Certains ouvrages, soustraits aux regards et aux pillages des étrangers durant la colonisation, seraient encore enfouis sous le sable.

A l’occasion d’une exposition organisée par la bibliothèque Fondo Kati à Tombouctou pour promouvoir la renaissance de la culture hispano-musulmane et contribuer à faire connaitre l’héritage commun et les liens étroits qui ont uni dans le passé des régions et des villes espagnoles comme l’Andalouse et Tolède à la Boucle du Niger, la journaliste Salimata DIOUARA écrivait:

Selon M. HAÏDARA, l’explorateur Mahmoud Kati a laissé derrière lui plusieurs milliers de manuscrits, écrits en arabe, en hébreu et en espagnol, actuellement conservés dans la bibliothèque familiale Fondo Kati de Tombouctou. Cette bibliothèque a été créée par Mahmoud Kati, fils d’Ali Ben ZIYAD et de Kadidia SYLLA qui est la grande sœur de l’empereur Askia Mohamed. Elle comprend 14.000 manuscrits dont 7.000 sont déjà répertoriés.

Selon le site tombouctoumanuscripts.org, l’Afrique du sud a financé la construction du Nouvel Institut Ahmed Baba pour un montant de 2,5 milliards de Francs CFA [Euros 381 000] disposant de 4 800 m2locaux dont un amphithéâtre de 500 places, une salle de conférence de 300 places et une bibliothèque. Ce centre:

possède actuellement une collection d’environ 30000 manuscrits collectés grâce aux efforts de quelques personnalités exceptionnelles telles que le Dr Mahmoud Zubayr, premier directeur du centre, et Abdul Kader Haidara qui a travaillé pour CEDRAB avant d’établir sa bibliothèque personnelle. Ce chiffre de 30000 manuscrits est encore quelque peu conservateur si l’on considère le nombre estimé de manuscrits existant dans la région.

Christelle Marot rappelait-elle aussi dans son billet cité plus haut sur Africultures:
l’Arabie Saoudite et le Koweït ont donné près de 45 millions de francs CFA [Euros 68 602]au centre Ahmed Baba, outre les actions déjà menées par l’Unesco, la Norvège et le Luxembourg. ” Pour les privés, ce sont des fondations qui interviennent largement….”.

Le drapeau noir des islamistes fondementalistes flotte sur Tombouctou par Boubacar Bah sur Twitter

Qu’adviendra -t-il de ce trésor de l’humanité? Après la fulgurante prise de la ville de Tombouctou par les rebelles touaregs et les mouvements islamistes Ansar Dine et Al-Qaïda au Maghreb (Aqmi),  l’anxiété est grande de par le monde quand à la réponse à cette question. Dans un billet intitulé “Après les Bouddhas de Bamyan, les manuscrits de Tombouctou?” , Hervé Bar cite les propos de Hamady Bocoum, directeur de l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) à Dakar:
“Des manuscrits uniques (près de 100.000) sont conservés depuis plusieurs siècles à Tombouctou, ville savante, ville des 333 saints, où pratiquement chaque concession est un patrimoine, une bibliothèque “Possession des grandes lignées de la ville, ces manuscrits, les plus anciens remontant au XIIe siècle, sont conservés comme des trésors de famille dans le secret des maisons, des bibliothèques privées, sous la surveillance des anciens et d’érudits religieux.Ils sont pour la plupart écrits en arabe ou en peul, par des savants originaires de l’ancien empire du Mali. Ces textes parlent d’islam, mais aussi d’histoire, d’astronomie, de musique, de botanique, de généalogie, d’anatomie…Autant de domaines généralement méprisés, voire considérés comme “impies” par Al-Qaïda et ses affidés jihadistes. L’exemple funeste des Bouddhas de Bamyan, dans le centre de l’Afghanistan, vient immédiatement à l’esprit.

A SUIVRE SUR

Une réflexion sur “Tombouctou (Mali) : des trésors culturels de l’humanité en danger

  1. Le soleil de Tombouctou ( Partie I : Fatalité)

    « Le soleil se lève alors sur cette terre rougeâtre et désolée,
    Où pauvres hères et drôles languissent dans la pulvérulence,
    La vie s’est éteinte à tout jamais dans leur regard oppressé,
    Comme elle s’est éteinte sur ces dépouilles battues à outrance,

    Le soleil éclaire ces faces où subsiste une étoile d’espérance,
    Sa lueur s’attarde sur le visage d’un vieillard débonnaire,
    Embrassant ses oripeaux loqueteux qui respirent la misère,
    Il lui manque cinq doigts, c’est eux, eux! Dans leur violence.

    A quelque encablure de là, sur un étroit lopin desséché,
    Un enfant enturbanné et moribond engloutit la terre,
    Sa mère le fixe d’un œil vitreux, bras croisés sur sa nudité.
    Elle ne marque aucune surprise, les pieds dans la poussière.

    Tous sont dans l’expectative d’une liberté volée,
    Nul sourire n’illumine le masque terne de leur visage,
    Les bourreaux, non loin, ne cessent jamais de les surveiller,
    Tout de noir vêtus et leurs armes pointées, écumants de rage.

    Le soleil est la seule joie et la seule distraction de ces opprimés,
    Le soleil est leur espoir de vivre, il les accompagne chaque jour.
    Chaque jour, il les baigne de sa flamboyance telle l’Amour,
    Chaque jour, il les quitte pour les laisser à la nuit et à la cruauté. »

    ‘Voyage entre Cieux et Enfers’; tous droits réservés.

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