DONNEES ET ANALYSES

Maroc, un « printemps » tranquille ?

SENAT

Rapport de groupe interparlementaire d’amitié

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Quatorze ans après l’avènement du Roi MOHAMMED VI, le Maroc poursuit sa modernisation politique, économique et sociale. Bien avant les « printemps arabes »,cette politique a, sans doute, permis au Maroc de faire sa« révolution » de manière plus ordonnée et plus profonde.

Politiquement, le Maroc s’est doté d’une nouvelle Constitution en juillet 2011, adoptée par référendum, s’inspirant des principes d’une monarchie parlementaire.

Dès les élections législatives de novembre 2011, les nouveaux mécanismes institutionnels ont fonctionné puisque M. Abdelilah BENKIRANE, chef du parti Justice et Démocratie (PJD), sorti vainqueur des élections, a été nommé Premier ministre par le Roi.

La prochaine étape importante sera la réforme territoriale, préalable à celle de la Chambre des Conseillers.

Économiquement, à partir de 2008, le Maroc n’a pas échappé à la crise économique mondiale. Toutefois, il a préservé et consolidé ses équilibres macro-économiques, ce qui s’est traduit par un meilleur « risque pays ». En 2013, au sein du Maghreb, le Maroc est sans aucun doute une des économies les plus florissantes et les plus à même d’affronter les défis de la mondialisation.

Socialement, la question sociale reste entière et les attentes de la société très fortes. En effet, le fort taux de chômage des jeunes, notamment diplômés, crée une situation parfois explosive exprimée par le « mouvement du 20 février »(2011) qui manifeste des attentes de justice sociale et de partage des fruits de la croissance.

Le Maroc de 2013 est un pays qui a su jusqu’à maintenant mener une politique de modernisation, comme tend à le prouver le « statut de pays avancé » qui lui a été attribué par l’Union européenne.

Dans un Maghreb où les « Printemps arabes » ont apporté tout à la fois espoir et inquiétude, le Maroc est un gage pour la paix et la prospérité. La France, partenaire historique du Maroc, soutient la politique menée depuis 1999 par les dirigeants marocains. Elle estime, en effet, que cette politique est une chance pour le Maroc, mais aussi parce qu’au-delà, il y va de l’avenir de la région et peut-être même de l’Europe.

I – LE MAROC, UNE DÉMOCRATIE EN MARCHE

Le Maroc de 2013 est un pays transformé et en mutation constante. Cette « révolution », initiée en 1999 par le nouveau Roi, MOHAMMED VI, a permis à ce pays de franchir le ½Printemps arabe½ de 2011 avec plus d’assurance et d’efficacité, tant d’un point de vue politique, qu’économique ou social.

Si le Maroc est un pays en mutation, il est aussi un pays rassemblé autour de la cause nationale qu’est le sort du Sahara occidental, au moment du renouvellement du mandat de la mission de l’ONU, la MINURSO prévu le 30 avril 2013. En outre, des évènements militaires et terroristes ont marqué cette région début 2013 avec, notamment, l’intervention militaire française au Mali.

Les entretiens avec MM. Mohamed Cheikh BIADILLAH, Président de la Chambre des Conseillers, Karim GHELLAB, Président de la Chambre des Représentants, Mohand LAENSER, Ministre de l’Intérieur, ainsi qu’avec les membres du groupe d’amitié Maroc-France de la Chambre des Conseillers, ont permis à la délégation de prendre la mesure de l’évolution du Maroc depuis 2010, date du précédent déplacement d’une délégation du groupe au Maroc.

A. UN PAYS EN MUTATION

1. La situation politique

Les réformes engagées au Maroc, à travers notamment l’adoption d’une nouvelle Constitution en 2011, ont permis de répondre à beaucoup d’aspirations populaires exprimées dans le pays dans le contexte des printemps arabes. L’expérience marocaine fait ainsi office au Maghreb de modèle en matière de réformes.

Pour autant, le maintien de la stabilité à moyen terme n’est pas acquis et reste étroitement lié à la capacité du gouvernement à répondre aux défis économiques et sociaux du pays, qui restent la première préoccupation de la grande majorité des citoyens marocains. L’échec de l’expérience gouvernementale actuelle susciterait au sein de l’opinion la défiance envers les réformes engagées en 2011, qui serait imputée à la classe politique représentée au Parlement.

De ce point de vue, la configuration politique actuelle n’est pas celle d’une confrontation entre les deux têtes de l’exécutif, le Roi et le Gouvernement. En effet, la réussite des réformes engagées dépend aujourd’hui de l’entente entre ces deux centres du pouvoir sous le contrôle du Parlement.

Le Maroc de MOHAMMED VI, au pouvoir depuis 1999, a engagé une politique de modernisation politique, économique et sociale. La création et les conclusions de l’instance de réconciliation nationalesont de ce point de vue un symbole fort d’unevolonté de ½solder les comptes du passé½.

Le contexte régional des printemps arabes en 2011, a provoqué une accélération du mouvement des réformes.

Le Roi a ainsi annoncé en mars 2011 une réforme constitutionnelle. La nouvelle Constitution a été adoptée lors du référendum du 1er juillet.

Le Maroc se définit désormais comme une monarchie parlementaire avec un exécutif bicéphale ; la relation entre les pouvoirs est clarifiée, les rôles du chef du Gouvernement et du Parlement ont été substantiellement renforcés.

Des élections législatives anticipées se sont tenues le 25 novembre 2011 et ont été remportées par le Parti de la justice et du développement (PJD, islamistes modérés) avec 27 % des sièges. Le PJD ne disposant pas de la majorité, il a dû former un gouvernement de coalition avec l’Istiqlal (nationaliste et conservateur), le Mouvement populaire (MP, berbère et conservateur) et le Parti du progrès et du socialisme (PPS, ancien parti communiste). Conformément aux dispositions de la nouvelle constitution, le Roi a nomméM. Abdelilah BENKIRANE, chef du Gouvernementet les membres du Gouvernement, ½sur la proposition de celui-ci ». La récente crise gouvernementale (28 mai 2013) avec le souhait de l’Istiqlal de se retirer de la coalition ne semble pas, au final, menacer celle-ci ; en effet, la sortie de crise la plus plausible serait le maintien de l’Istiqlal au prix de certains aménagements. Dans cette hypothèse, des élections anticipées ne seraient pas à l’ordre du jour.

Le PJD incarne un vent de renouveau sur la scène politique grâce à une focalisation de son discours sur les thèmes porteurs de la corruption et de l’égalité de tous devant la chose publique. Il donne l’impression d’être un parti plus justicier qu’islamiste. Il est surtout le résultat de l’intégration dans le système monarchique d’une partie de la mouvance islamiste des années 1990. Il rejette ainsi tout lien avec les Frères musulmans, pour des raisons tant idéologiques que tactiques. Son modèle est fondé sur la séparation des fonctions politiques et de prédication.

Malgré les critiques, le PJD a remporté 4 sièges sur 11 aux dernières élections législatives partielles.

La transition engagée avec la nouvelle Constitution avance progressivement (5 lois organiques sur 19 adoptées) parce que le Gouvernement estime que les thèmes de la lutte contre la corruption et de l’égalité de tous devant la chose publique sont plus porteurs que le rééquilibrage des pouvoirs au sein de l’exécutif. D’ailleurs, le Roi reste actif sur la scène politique face à un partenaire qui n’est pas celui qu’il aurait forcément choisi. Mais sa décision, respectant la lettre de la Constitution, a eu le mérite de marquer la volonté du souverain d’avancer dans la voie de la construction de la monarchie parlementaire qu’il appelle de ses voeux.

Les réformes engagées en 2011ont, pour le moment, écarté unecontestation de grande ampleur. Les principales forces d’opposition populaires -comme le mouvement du 20 février- n’ont pas disparu mais trouvent moins d’écho dans la population qui estime avoir été entendue. En revanche, le poids des cheikhs salafistes libérés en février 2012 par grâce royale reste la grande inconnue. Au total, l’avenir de la contestation reposeen large partie sur la réussite ou non dugouvernement actuel qui incarne les aspirations au changement des Marocains.

2. La situation sociale

Si, dans le contexte des printemps arabes, le Maroc a su contenir la colère populaire et accélérer sa transition démocratique et politique, la question sociale reste entière et les attentes de la société, notamment de la jeunesse, très fortes. C’est aujourd’hui le principal défi auquel est confronté le gouvernement marocain.

Les chantiers sociaux lancés par le pouvoir sont, depuis 1999, nombreux (réforme du code de la famille, création d’un code du travail …etc.).

Pour lutter spécifiquement contre la pauvreté, le Roi a lancé, en mai 2005,l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH), ciblée sur les communes rurales et les quartiers urbains défavorisés afin d’apporter une réponse globale à l’ensemble de leurs difficultés.

En matière de développement humain, l’éducation constitue la première des priorités du Gouvernement, qui a lancé en 2009 son Plan d’urgence pour l’éducation.

De nombreux projets sociaux sont depuis des années à l’étude (couverture chômage, réforme des retraites, droits de grève et syndicaux) auxquels se sont ajoutés les droits sociaux inscrits dans la nouvelle Constitution de 2011.

Le poids des revendications sociales dans les mouvements contestataires du printemps 2011, portées au Maroc par le Mouvement du 20 février, a poussé à une accélération de ces projets. Toutefois, force est de constater que les résultats se font encore attendre face à une population, notamment parmi les jeunes, très en attente eu égard au fort taux de chômage qui la touche.

Le chômage des jeunes en milieu urbain atteint 33,5%. La plupart des secteurs d’activités fait face à un déficit de main d’oeuvre qualifiée à cause de l’inadéquation formation/emploi aggravée par les déficiences du système éducatif.

3. La situation économique

Depuis le début de la crise économique et financière qui a frappé le monde occidental en 2008, le Maroc a été relativement protégé même si la croissance économique depuis 2008 n’est plus celle du début des années 2000.

Si le Maroc a renoué, depuis 2011, avec la croissance économique, celle-ci reste tributaire des résultats agricoles et de la demande mondiale.

Cette résilience de l’économie marocaine s’explique par des raisons objectives, telle que la solidité de la consommation intérieure qui croît de 6% l’an, ou encore la continuité des investissements publics. Ces deux facteurs ont largement contribué à soutenir l’économie marocaine.

En outre, il faut tenir compte de l’influence de l’agriculture sur la croissance économique du Maroc. Les variations dans ce secteur ont une influence directe sur l’état de l’économie. Ainsi, pour preuve, l’impact négatif de la mauvaise année 2012 sur le taux de croissance qui est descendu à moins de 3 %, et qui devrait se redresser à près de 5 % en 2013, grâce à l’excellente campagne agricole qui s’annonce.

Mais, l’expansion économique a besoin de financement, lequel a été mis à mal par la crise mondiale. Or le Maroc souffre d’une insuffisance de devises du fait que ses importations sont de loin supérieures à ses exportations, mais aussi du fait que les autres sources de rentrées de devises dans le pays ne  comblent plus les besoins de l’économie marocaine, en particulier les ressources liées au tourisme qui se sont affaiblies.

Les déficits des comptes extérieurs et budgétaires se sont creusés. La dette publique demeure toutefois au niveau acceptable de 53 % du PIB. Les revenus du tourisme, qui représentent 7 % du PIB en moyenne, sont affectés par la crise économique internationale et la situation politique régionale. Le taux de chômage, qui est passé sous la barre des 10 % en 2006, a continué à décroître pour atteindre 9,1 % en 2010 et 2011, avec toutefois la persistance de niveaux élevés parmi les jeunes urbains et les diplômés (respectivement 32 % et 20 % de chômage).

Enfin, sur le plan des équilibres financiers, le déficit commercial est structurel. Il s’est aggravé de 25,2 % de 2010 à 2011, passant de 148,3 à 185,7 milliards de dirhams.

La progression des exportations (phosphates notamment) est absorbée par le retour à la hausse des hydrocarbures. Le déficit budgétaire se creuse nettement en 2011 pour atteindre, sous l’effet conjugué d’une baisse des recettes fiscales et de la hausse des subventions publiques au maintien des prix intérieurs.

Au total, malgré la dégradation récente de certains indicateurs, due aux effets de la crise économique mondiale, la décennie 2000 se caractérise par la consolidation des équilibres macroéconomiques, ce qui s’est traduit par la progression de la notation « risque pays » du Maroc.

LA SÉCURITÉ DANS LA RÉGION SAHÉLIENNE : LE DOSSIER DU SAHARA  OCCIDENTAL

La question du statut de ce territoire reste non résolue depuis le départ de l’Espagne en avril 1975. Véritable cause nationale pour le Maroc, cette question est également :

– un enjeu diplomatique pour les relations du Maroc avec les pays d’Afrique et du Maghreb dont, au premier chef, l’Algérie ;

– un enjeu économique parce que cette question est un obstacle à la formation d’un Maghreb prospère et stable ;

– un enjeu sécuritaire en raison de l’activisme terroriste et mafieux dans la région et les États limitrophes ;

– un enjeu humanitaire pour les populations sahraouies concernées.

Pour mettre fin à une situation source de dangers non seulement pour ce pays, mais aussi pour le Maghreb et, au-delà, l’Europe, le Maroc a présenté au Secrétaire général de l’ONU, le 11 avril 2007, un plan d’autonomie pour le territoire, destiné à servir de base pour les négociations avec le Front Polisario. Le Conseil de sécurité dans sa résolution (2007-1754) a qualifié les efforts du Maroc de « sérieux et crédibles » et a demandé l’ouverture de négociations directes entre les parties.

En 2010, une délégation du groupe d’amitié s’était déplacée au Sahara occidental ; elle avait fait trois constats majeurs, toujours d’actualité (Rapport n° GA 94 Maroc : l’ère du changement – Novembre 2010) :

– l’impossibilité d’organiser un référendum sur l’autodétermination du territoire ;

– le risque sécuritaire pour la stabilité de la région ;

– l’important effort du Maroc pour développer ce territoire.

Au terme de son déplacement, la délégation, toutes opinions politiques confondues, avait considéré que la proposition d’une large autonomie au sein du Maroc constituait une base sérieuse de négociations.

Cette position est également celle de la diplomatie française qui, au regard de ses liens avec le Maroc et l’Algérie, a toujours considéré qu’elle avait une responsabilité particulière pour appeler les responsables marocains et algériens à négocier sur cette base. Le Président de la République française, lors de sa récente visite officielle -3 et 4 avril 2013- a renouvelé devant le Parlement marocain l’appui de la France à la politique marocaine dans ce territoire.

Les actions terroristes dans cette région (attentats, enlèvements), les traficsd’armes et de drogue encouragés par l’instabilité consécutive aux « Printemps arabes » et à l’effondrement de l’État malien ont évidemment donné une actualité particulière à ce dossier.

En effet, la situation sécuritaire dans le Sahel et l‘enlisement du dossier du Sahara occidental inquiètent les pays de la région et au-delà. Ils voient dans ce conflit une cause supplémentaire de tensions et de développement possible d’actions terroristes dans cette zone.

À ce constat de fond, s’ajoutent deux facteurs plus conjoncturels :

§ la crainte récente de la radicalisation des jeunes du POLISARIO, susceptibles d’être instrumentalisés par des mouvements islamistes radicaux ;

§ le renouvellement du mandat de la MINURSO qui a expiré le 30 avril 2013.

Dans ce contexte, la proposition américaine d’inclure dans la mission de la MINURSO la question des droits de l’Homme a suscité de vives réactions au Maroc. Le Maroc estime, sur le fond, avoir traité ce dossier en installant une commission nationale des droits de l’Homme (CNDH) avec des commissions régionales réparties sur tout le territoire dont une au Sahara occidental. Par ailleurs, la proposition des États-Unis, allié fidèle du Maroc, a surpris la classe politique marocaine.

Face aux vives réactions provoquées par leur projet, les États-Unis ont retiré leur proposition. Ils ont sans doute voulu préserver un allié fidèle à un moment où le Maroc est une pièce essentielle du dispositif de lutte contre le terrorisme dans la région.

Cette crise a permis de souligner :

– l’urgence à régler ce dossier dont Ban KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, souligne que « la montée de l’instabilité et de l’insécurité au sein et autour du Sahel requiert une solution urgente de ce conflit qui dure depuis trop longtemps » ;

– le réalisme de la proposition marocaine, qui a permis de maintenir la sécurité dans cette région et favorisé un développement économique au bénéfice des populations concernées. La situation actuelle au Sahel ne fait que renforcer le bien-fondé de l’initiative marocaine.

Par ailleurs, l’Algérie, qui a connu, dans les années 1990, les heures noires du terrorisme, a pris la mesure du danger terroriste qui menace la région et donc son territoire. Les facilités de vol accordées à l’armée française lors de son intervention au Mali constitue un indice de cette évolution de la position algérienne. Dans la foulée, plusieurs responsables algériens ont donc pris conscience de la nécessité d’éteindre un possible foyer terroriste au Sahara occidental, situé à leurs frontières.

L’EAU, LA MAÎTRISE D’UNE RESSOURCE RARE

A. L’ÉTAT DES LIEUX

1. La ressource en eau

Le Maroc est un pays en état de « stress hydrique« . L’eau est une ressource rare etrépartie inégalement entre le nord et le sud du pays. Les sécheresses des années 1990 et 2000 n’ont fait que renforcer cette rareté de la ressource.

Toute politique de gestion de l’eau (accès, assainissement et gestion de la ressource) doit donc prendre en compte cette réalité d’autant que le développement que connaît le pays depuis 1999 implique une consommation d’eau potable en forte augmentationainsi que des besoins croissants en matière de traitement.

Actuellement, les ressources en eau du Maroc sont de 22 milliards de m3 environ par an contre 29 milliards avant les sécheresses de 1990 et 2000.

Sur ce total, 20 milliards de m3 sont mobilisables dont 16 milliards en eau de surface et 4 milliards en eaux souterraines.

Par comparaison, les 128 barrages existants ont une capacité de stockage de 14 milliards de m3, soit moins que la consommation annuelle en eau des Marocains.

LE RÉGIME PLUVIOMÉTRIQUE AU MAROC ET SES CONSÉQUENCES

Les précipitations se produisent généralement en deux périodes pluviales, la première en automne et la seconde en hiver. Le nombre de jours pluvieux varie de l’ordre de 30 au sud du pays à près de 70 au nord.

Cette situation risque de se dégrader sous l’effet des changements climatiques. En effet, en dépit de la pluviométrie favorable de ces deux dernières années, la menace de sécheresse plane toujours sur le pays à l’instar des périodes 1980-1985 et 1990-1995 et 1998-2002.

Le secteur le plus touché en cas de déficit hydrique reste l’agriculture sachant que la répartition de la consommation d’eau montre que le secteur agricole arrive en premier (80 % de la consommation), suivi de l’usage domestique (alimentation en eau potable urbaine et rurale) et de l’industrie.

La plupart des bassins hydrauliques connaissent des déficits hydriques, notamment Moulouya (10 %), Bouregreg (8 %), Souss-Massa (3 %) et la zone sur de l’Atlas (20 %) et il est prévu qu’en 2020, la situation de déficit atteindra six bassins sur huit.

La surexploitation, qui découle de ces périodes de sécheresse se traduit, en autres, par le tarissement des sources, la baisse du niveau des nappes, la régression de l’irrigation traditionnelle dans les oasis et la dégradation des écosystèmes aquati-ques.

Source : Ministère de l’Environnement

2. Les opérateurs du secteur de l’eau

a) La production

Elle est assurée essentiellement par l’Office national de l’eau et de l’électricité (ONEE),créé en 2009 par le regroupement des offices nationaux de l’eau potable (ONEP) et de l’électricité (ONE). L’Office est le premier producteur d’eau potable -80 % de la production- et couvre les besoins de 96 % de la population urbaine.

b) La distribution et l’assainissement de l’eau

Elles relèvent de quatre opérateurs :

– l’ONEP (28 % de la population – petites et moyennes villes) ; il est le premier distributeur   avec 1,2 million d’abonnés sur 500 communes ;

– les opérateurs privés (4) à Casablanca, Rabat, Tanger et Tetouan (38 % de la population) ;

– les régies municipales (12) comme celle de Fès, Meknès, etc… (31 % de la population) ;

– les régies directes (40) (3 % de la population).

La charte communale de 1976, modifiée en 2002 et 2008, prévoit que les services publics comme l’eau, l’assainissement et l’électricité sont de la compétence des communes. Il y a 1.547 communes au Maroc dont 249 urbaines et 1.298 rurales. Les communes ont le plus souvent délégué la gestion de leur service de l’eau à des concessionnaires ou à l’ONEP. Pour ce qui de l’assainissement, il est géré dans les petites et moyennes communes directement par ces dernières. Au fur et à mesure de l’avancement du plan d’assainissement, l’ONEP en reprend la gestion.

Enfin, il faut souligner en milieu rural, l’action desassociations d’usagers qui sont le mode gestion le plus répandu pour les systèmes d’alimentation en eau potable. Il existe plus de 11.000 associations qui assurent le fonctionnement technique des installations sous le contrôle de la population et grâce à un agent d’exploitation embauché par les associations.

c) La gestion de la ressource

Elle est assurée par neuf agences de bassin hydrauliques (ABH). Relèvent de leurs responsabilités la qualité de l’eau, le prélèvement et les rejets dans le milieu naturel ; ses missions sont définies dans le plan direction d’aménagement intégré des ressources en eau (PDAIRE).

Pour le consommateur, les distributeurs revendent l’eau à un prix unique avec des tarifs différenciés selon le volume de consommation. Cette méthode permet d’inciter les consommateurs à une modération en termes de volume. Par ailleurs, le tarif relativement bas de la 1ère tranche -cinq fois moins élevé que celui de la dernière tranche- vise à concrétiser le « droit à l’eau pour tous« .

Gestion de la ressource en eau et facturation

Tranche

Consommation trimestrielle /m3

Prix par m3

1ère

De 0 à 18 m3

0,23 €

2ème

De 19 à 60 m3

0,71 €

3ème

De 61 à 120 m3

1,06 €

4ème

Plus de120 m3

1,07 €

Source : ONEE- Branche eau 2013

3. La politique de l’eau 1999-2013

En 1999, à l’avènement du Roi MOHAMMED VI, les défis à relever étaient :

– l’accès à l’eau potable en milieu rural, en particulier concernant l’habitat dispersé ;

– le traitement des eaux usées ;

– la maintenance et la construction de systèmes d’exploitation en milieu urbain. Une attention   particulière devait être portée au raccordement en eau potable dans les« quartiers   informels » des grandes villes.

Pour ce faire, plusieurs grands programmesont été lancés :

– le programme national d’assainissement (PNA) ;

– le programme d’accès généralisé à l’eau en milieu rural (PAGER) ;

– le programme national d’économie en eau d’irrigation (PNEII).

Ces programmes s’appuient sur la politique de construction des barrages commencée dans les années 1930 et relancée par HASSAN II dans les années 1960 avec l’objectif d’un million d’hectares irrigués,objectif atteint en 1997. Grâce à cette stratégie qui a permis l’émergence de véritables pôles régionaux d’activités économiques, le Maroc a pu faire face aux besoins grandissants en eau de sa population et de son économie. Elle a contribué de manière décisive à l’approvisionnement en eau des secteurs de l’eau potable, de l’irrigation et de la production énergétique.

La stratégie nationale de l’eau ambitionne la réalisation d’une moyenne de trois grands barrages et plusieurs dizaines de petits ouvrages par an, avec l’objectif de construire d’ici 2030 près de 50 nouveaux barrages.

Une démarche exemplaire : Marchica Med

Entretien avec M. Saïd ZARROU

Directeur général de l’Agence

pour l’Aménagement du site

de la lagune de Marchica à Nador

(1er mai 2013)

Le lieu

Près de Nador, au bord de la Méditerranée. Lagune isolée de la Méditerranée par un cordon lagunaire de 25 km.

Le projet

. Dépollution du site et construction d’équipements de traitement de l’eau et des déchets.

. Création d’une zone écotouristique.

Les moyens

. Une agence publique d’aménagement (2010).

. Création de 7 zones d’aménagements (parcs naturels, villages de pêcheurs, stations balnéaires…) sur 2.000 ha.

. Association de capitaux publics et privés.

Nador : le projet Marchica Med

A ces programmes, s’ajoute le programme « d’Initiative Nationale pour le Développement Humain » (INDH), qui permet, entre autres, de financer dans les grandes villes les branchements « sociaux » d’eau et d’assainissement. Ces projets liés à l’INDH ont fait l’objet de financements particuliers sur la base du principe « aide basée sur les résultats« .

En matière d’accès à l’eau potable, cette politique a largement porté ses fruits. En 2013, près de 100 % de la population urbaine a accès à l’eau potable et 91 % de la population rurale. Dans ce secteur, l’ONEP est le premier producteur avec près de 800 millions de m3, soit 80 % de la production nationale.

En matièred’assainissement, le PNA lancé en 2005, eu égard au retard accumulé dans ce secteur, fixaient les objectifs suivants :

– l’extension et la réhabilitation du réseau ;

– le branchement et le renforcement du réseau pluvial ;

– la réalisation de stations d’épuration dans près de 350 centres urbains.

Pour ce qui est du volume des eaux usées traitées au niveau national, il avoisine les 40 % pour un objectif de 50 % en 2016, 80 % en 2020 et 100 % en 2030.

Actuellement, le taux de raccordement au réseau d’assainissement en milieu urbain est de 70 %. L’objectif est d’atteindre 100 % en 2030. En milieu rural, il se situe aux environs de 50 %. Il reste le cas particulier des quartiers périurbains des villes intermédiaires encore sous-équipés.

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